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RESTER SOIGNANT OU DEVENIR CLASSIFICATEUR MEDICO-ECONOMIQUE ? (La Lettre N°144)

Texte rédigé sur (plutôt sous) le coup d’une formation intra hospitalière à la T2A

mercredi 16 septembre 2009, par philippe REGARD

Texte rédigé sur (plutôt sous) le coup d’une formation intra hospitalière à la T2A

Les formateurs étaient compétents dans leur domaine et gentils : un juriste, un médecin DIM et un contrôleur de gestion hospitalière. Intelligents aussi car ils avaient déjà intégré une loi pas encore votée, le texte auquel Bachelot laissera son nom comme Thatcher a laissé le sien dans le domaine de l’insécurité ferroviaire. La mise en concurrence des secteurs privés et publics de soins ne permettant pas assez vite l’enrichissement des groupes relais des fonds de pension, la pression s’accroît sur les établissements publics pour leur faire lâcher les activités rentables au profit du privé.

Les agences régionales de santé (ARS) vont disposer d’une enveloppe fermée, bloquée et restreinte d’une année sur l’autre ; pour la partager, il n’est pratiqué aucune analyse des besoins de la population en matière de soins, ni sur le plan démographique, ni sur le plan géographique ; les notions de proximité, de pathologie environnementale ou spécifique sont absentes. Par contre la mise en concurrence des hôpitaux publics par le paiement à l’acte technique médical, la T2A (tarification à l’activité), est devenue la seule préoccupation car ce sera la base des revenus des établissements. Pour limiter la grogne et faire un peu « social », il y aura bien l’argent des MIGAC (missions d’intérêt général) mais c’est déjà un réajustement minime.

L’application de la T2A pourrait être simple : une cholécystectomie chez un citadin de 50 ans = une cholécystectomie chez une dame de 85 ans isolée à la campagne. Pour atténuer la perversité évidente de ce système de paiement, beaucoup d’autres variables ont été introduites, durée moyenne de séjour, nombre d’admissions, file active, journées d’hospitalisation (de jour, de semaine, etc). Cela devrait nous rassurer mais la manipulation des chiffres, qui aboutissent finalement à un indice de valorisation de l’activité (points IVA), permet déjà de limiter les crédits, en pratique, de justifier la pénurie programmée à l’échelle régionale par les enveloppes inextensibles. Antoni Tapies « pieds et croix » 1990 Les futurs gestionnaires hospitaliers ne rendront que ces multiples chiffres ; mais rien sur la satisfaction des besoins en soins puisqu’ils ne sont pas définis. Pour faire propre, de nombreuses procédures d’accréditation, de certification (comme pour les gares SNCF), d’évaluation des pratiques professionnelles sont mises en place : leur intérêt est évident, leur utilisation comme outil pour sanctionner financièrement l’est moins.

Ce système complexe et déshumanisé cache le transfert des soins lucratifs au secteur privé, en expliquant les bienfaits de la compétitivité. Pour que ça marche, il est urgent de formater dès maintenant les responsables médicaux et administratifs des hôpitaux : ils doivent être meilleurs que leurs voisins, devenus concurrents à l’échelon régional, pour conserver leur outil de travail, d’où les formations au codage : Appuyé sur le principe suivant : «  vous produisez du soin, vous devez savoir le vendre à sa juste valeur  », c’est-à-dire valoriser sa cotation.

Les gentils formateurs nous ont rassuré ; le système sera organisé pour avoir un «  effet survalorisant non masqué par une surcotation  », mais alors pourquoi nous former ? Nous savons donner les diagnostics principaux (DP), mais bien sûr pas quel diagnostic associé significatif (DAS) va le modifier pour permettre une durée de séjour plus longue et acceptable, encore moins quelles complications ou morbidités associées (CMA) permettront de monter dans la sévérité des groupes homogènes de malades (GHM), eux-mêmes regroupés en racines.

Quand vous aurez tout compris et maîtrisé, vous deviendrez enfin un bon gestionnaire, serez-vous toujours un vrai soignant ? Quand vous saurez que la base d’exploitation de toutes ces données n’est pas la même pour le public et le privé, vous aurez une désagréable impression d’avoir été manipulé ….au détriment de qui ?

Bernard SENET

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